“La nasse ne constitue pas seulement une technique de guerre psychologique que le maintien de l’ordre français a tardivement importée d’Angleterre. La nasse est une image dialectique du pouvoir présent. C’est la figure d’un pouvoir méprisé, honni, et qui ne fait plus que retenir la population dans ses filets. C’est la figure d’un pouvoir qui ne promet plus rien, et n’a d’autre activité que de verrouiller toutes les issues. D’un pouvoir auquel plus personne n’adhère positivement, que chacun tente à sa manière de fuir, et qui n’a d’autre perspective panique que de maintenir dans son giron borné tout ce qui , incessamment, lui échappe. Dialectique, la figure de la nasse l’est en ceci que ce qu’elle a vocation à enfermer, elle le rassemble aussi. Des rencontres s’y produisent entre ceux qui tentent de déserter. Des chants inédits et plein d’ironie en naissent. Une expérience commune s’y fait. Le dispositif policier est inapte à contenir la sortie verticale qui s’y produit sous la forme de tags qui ne tardent pas à consteller chaque mur, chaque abribus, chaque commerce. Et qui témoignent de ce que l’esprit, lui, reste libre, même quand les corps sont retenus.”
Comité invisible, Maintenant, La Fabrique, p.31
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